Soufflant un peu entre des sacs bourrés de feuilles mortes, voilà Barak, écureuil noir du coin faisant l’acrobate agile, Raymonde a suspendu sa mangeoire à graines, il rôde, nos mésanges s’énervent, je le chasse, il revient sans cesse, finit par me cracher : « Serais-tu capable, jasminovitch, d’une chronique entière sans un seul point ?, on me connaît, je m’y jette :
d’abord pour signaler un bien goûteux « resto provençal », Chemin Péladeau juste au pied de la SAQ, aussi un autre, aussi bon marché le midi, chez « Luciano », quartier Mont-Rolland, qui me rappelle « La Chaumière », lieu cher disparu, angle Richer, printemps de 1970, et, sur sa terrasse côté lac Rond, rencontre avec le grand-manitou-des-programmes à TVA, l’ex-crooner Robert L’Herbier qui m’appréciait hénaurmément (!) en écrivain-chroniqueur, le big boss m’avait (très) généreusement offert de me transformer en tout-puissant anchorman à son ultra populaire Canal 10, mais, à quarante ans, père de deux enfants, ma frousse du free lancing, du pigisme, je m’incrustai au Canal 2 en fonctionnaire fédéral, sous haute surveillance comme je le racontais au Canal 4, à Rosette Pipar de Cogeco, je me savais estampillé security risk et hugly separatist par les Trudeau paranoïaques, du genre à foutre en prison-Parthenais le grand poète de Sainte Agathe, Miron, adieu donc à ce pont en or et, sept mois plus tard, ce sera la police chez moi, à une rue de la Prison de Bordeaux, pour vérifier l’état de ma fournaise (hum !), plus tard, les plaques de vélo de mes deux jeunes (hum !), j’étais candidat échevin dans Ahuntsic pour un parti ouvriériste, le FRAP, et, en médias, Jean Marchand, chef syndical défroqué et politicailleur névrosé, criait : « Le FRAP est la façade des terroristes du F.L.Q. », bang ! annulation de toutes nos réunions de cuisine, nos Montréalais vissés aux petits écrans, le Jérôme à Boubou-pas-de-culottes, Choquette, ministre de la Justice en cowboy fou, the gun in the belt, enfermé au Reine-Élysabeth, gueulant : « Faut faire bien attention d’être juste aussi avec la pègre », quelle page d’histoire hein ?, Drapeau le maire mégalo jappait aussi : « Ce FRAP élu, le sang va couler dans les rues ! », Pierre Laporte égorgé rue Armstrong à Saint-Hubert (on a jamais trop su comment) et puis les rats-de-la-cave-de-St-Marc mis en tôle, le calme revint, je ne serai pas échevin —adieu enveloppes brunes, trois ans passent, joli printemps de 1973, ma Raymonde entre un Lautrec-show et quoi encore ?, voit une pancarte « à vendre » à une rue de « La Chaumière », veille modeste maison, centenaire, au déclin de bois bombé, tout bosselé, l’herbe très haute partout, proprios en proie à la maladie, pour 25,00 tomates, Raymonde, jeune réalisateure de télé pas riche, cassa toutes ses tirelires, alla à sa Caisse de Radio-Canada, achetait ce qui sera… notre nid d’amour ! Fin.
« Ça y est, j’ai dit, je l’ai fait, Barak. Pas un point ! » La bête eut l’air satisfait.
Une réponse to “LE TEMPS ET RIEN D’AUTRE, M’SIEUR AZNAVOUR ?”
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Le monde de la politique n’est pas fait pour le monde honnête ! Vous avez bien fait de décrocher !