DARWIN, UN ÉCUREUIL ET LA LANGUE
11 mars 2011 | 1-Tout, Poing-comme-net
Dans nos pages, la collègue billettiste, Mimi Legault a parlé « animaux ». Avec esprit et chaleur. Avec humour. Elle souhaitait « le paradis » à nos fidèles compagnons quadrupèdes, les chiens. Comme pour les humains.
Et les animaux selon Darwin ? Son bref texte « L’INSTINCT… » —aller le chercher à notre bilio— est captivant et très étonnant. Soudain le fameux évolutionniste semble douter de sa célèbre —déjà en son temps— théorie. Il observe que des animaux adoptent des comportements fautifs, erratiques par rapport à sa géniale analyse. Cela lui fit constater que la voie de « l’adaptation » et donc de la « préservation » et perpétuation adaptée de tel animal, est parfois bafouée, ignoré, défié. Darwin en resta extrêmement songeur, oui, un grand homme ébranlé. Fallait-il parler d’exceptions ? Ou de quoi donc ? Quoi ? Aucun « instinct de survie » chez certaines bêtes.
Cher Darwin, « disparu » depuis longtemps et resté pourtant si fascinant encore. Ce savant en arrivait à se questionner sans cesse. Nous sommes entourés de gens —tit-Jos-connaissant— si sûrs d’eux, de tout savoir. Exemple : John Charest, vite, immersion dans la langue d’Abraham Lincoln et c’est notre salut ! J’aime que la vie, même pour des chercheurs émérites, surprenne encore. Garde certains secrets. Étonne un cerveau puissamment constitué.
La vie ? Tenez, tôt ce matin, mon ravissement. Couché mais les rideaux tirés, voir cet écureuil qui court à toute vitesse entre les poteaux sur le gros fil noir d’Hydro Québec. Il file vers l’ouest, revient vers l’est. Un va-et-viens foufou ! Ma fenêtre en devient un castelet, mon plaisir d’observer sa course bizarre, ses aller-retour incessants. Au dessus du boisé d’en face, un soleil brillant rend mon écureuil tout noir. Lui qui doit être un beau blond bien commun.
La vie.
La langue qu’on parle est aussi la vie, notre vie. Est en danger. Plein de contrées où tout le monde parle sans se questionner sur l’avenir de leur langue, partant de leur culture. Bons exemples ? Les Allemands ? Les Espagnols ? Des chanceux. Ici, au Québec, toujours cette angoisse. Sans cesse cette inquiétude. L’actualité tonne : l’anglais est devenu indispensable, faut l’enseigner dès la fin de l’école primaire ? Qui pourra nous enseigner ? Y a-t-il ailleurs cette maudite anxiété de voir disparaître sa langue nationale ? En Finlande, ça va ? En Norvège aussi ? En Suède ou au Danemark, tremble-t-on ? En Lettonie ou en Lituanie, même menace et danger ?
Ici, nous parlons et écrivons un français, hélas, plutôt approximatif. Enseigner à ces enfants fragiles une autre langue serait un désastre, disent les experts. D’autres : L’anglais au moins « basique » est la langue de 350 millions de gens à nos frontières. Le parler promet aux jeunes d’ici un meilleur avenir économique !
Vérité, mensonge ? Dans un aéroport d’Europe ou d’Asie quand un Roumain rencontre un Hongrois, ou un Chinois, un Russe, ils baragouinent l’anglais « basique » s’ils veulent communiquer. Québécois, majorité bafouée et lassés, si on cessait ce combat éternel. Assez de lutter. Collectivement et brusquement, changeons tous de langue, okay ? Une sixième année à baragouiner la langue d’Obama sera une farce inopérante, allons.
Lorsque j’ai écrit la fable qui suit (tirée de : La tulipe et le jardinier et 150 autres fables aux Éditions GID), je pensais à tout ce colonialisme dont les franco nous avons fait les frais. Empêchés de s’emplir les poches par un clergé qui voulait à tout prix garder son pouvoir temporel et intemporel, il valait mieux suivre que de marquer notre tempérament. Sortir la tête du lot était mal vu, c’était aller à contre-courant, presque immoral. Avoir des opinions bien à soi et croire que ce petit peuple de franco pourrait se lever pour affirmer son identité, était vu de l’intérieur comme un péché bon pour l’enfer.
Pour vivre en français chez nous, il faudrait d’abord être chez nous, chez nous. Moi aussi je rêve (encore un rêveur dira-t-on) d’un pays qui s’assume et dont la langue serait sujet de fierté et non de division.
Couchés sur le dos, les quatre fers en l’air à se faire bouffer ce qu’il nous reste encore de possibilité, les franco d’ici commencent à s’affaiblir et à pâlir. Bientôt, que restera-t-il? Dans quelle langue devrais-je parler à mes petits enfants puisque la langue que parlent les miens est bien souvent «approximative» comme vous le soulignez M. Jasmin.
Sans manifester le moindrement de remord, froidement come un bal de charognards qui grugent à pleines dents dans une proie si facle, nos bons voisins obamaïstes nous imposent leurs modes de vie (au pluriel) en s’infiltrant dans nos programmations télé et autres médias de communication. Et nous, nous marchons, nous rampons en attendnat leur permission pour parler leur langue.
Ceux qui parlent, encore une fois, sont vus comme des dérangeurs, comme si le fait d’avoir la conviction que le sentiment d’identité passe par la langue, est une chose à ne pas dire. comme s’il ne fallait pas réveiller un peuple qui s’est laissé chloroformer par un rêve qui n’est pas le nôtre, mais le leur.
Drapeau à la main et au coeur, en lieu et place du « Aux armes camarades! » si on osait dire » À la langue tout le monde ! » en criant haut et fort, peut-être que ça irait à quelque part, mais puisque personne ne semble vouloir lâcher son téléroman pour affirmer qu’on n’est pas que des marmottes écrasées au bord du chemin, hé bien, on tourne en rond et on donne raison à ceux qui ont toujours dit de nous qu’on n’est qu’un petit peuple.
Ma dernière fille (hé oui…) sera en sixième année en septembre qui vient, alors, il est certain que je serai du débat…
__________________________________
Le buffet des charognards (c)
Payant un peu cher son imprudence,
une marmotte invita, comme on le pense,
tous les prédateurs au buffet de sa chair
qui gisait les quatre pattes en l’air.
Moufettes, corneilles et corbeaux
lui enlevèrent tout, de la peau jusqu’aux os,
le reste fit l’affaire des plus petits,
les mulots, les larves et les fourmis.
Lorsque la table fut desservie,
il ne resta qu’un trace rougie,
et qui, avec l’aide du soleil,
finira bien par faire pareil.
Ne nous surprenons pas outre mesure
si, lorsque nous trouvons la vie dure,
qu’il s’en trouve pour l’empirer
comme des charognards affamés.
Pour leur éviter de faire de nous leur repas,
tenons le cap et marchons droit,
car, pour qui à moins de cœur que d’estomac,
manger du prochain est un repas qui se mange froid.
Commençons par parler et écrire correctement le français avant de se tourner vers Shakespeare.