Fin d’hiver, suffit !
15 avril 2011 | LES BELLES HISTOIRES LAURENTIENNES
Il a neigé à Port au Prince ? Oui ? Non ? Ici, il a neigé en plein mois d’avril l’autre matin ! Merde, on veut pas voir ça personne. Que le printemps s’installe plus franchement. Suffit l’hiver ! Il y a pas longtemps, mon Le gros chat madré est venu faire son tour. Pas vu de l’hiver mon mon monarque pourpre, Raminagrobis. Toujours il traîne sa lourde pelisse, toujours il se donne des allures de vieux roi tout puissant. À la blanche balustrade au bout de ma galerie, il s’est avancé le museau et a mis son nez en proue face au vent de l’ouest, il ventait fort sur le lac Rond et j’ai cru l’entendre miauler : « I am the king of the world »
Un fou ! Un dominateur la Gbabo en Cöte ivoirienne. Envie de sortir et de lui mettre mon pied au derrière. Pour lui apprendre les bonnes manières… Il me jette soudain un regard, à moi, l’humain en rober de chambre et bien planqué derrière les portes-patio. Il me nargue ? Non mais… Il roule des épaules, on dirait un de ces videurs, rue Saint-Laurent en 1950, quand je calais, jusqu’à très tard, à dix-neuf ans, de la Black Horse au Faisan Doré et que Normand chantait : « j’aime les nuits de Montréal, ça vaut bien la Place Pigalle… » Paroles et musiquette de feue Jean Rafa.
Mon Louis XIV s’est grimpé dans un transat ouvert, s’y recroqueville, une sombre grosse boule fourrée. Cette mauvaise humeur, je le sens ? Il a bien vu ce reste de neige ! En avril ! Son air de dégoût, il ferme les yeux et puis se redresse, d’étire, se secoue le violet pelage, puis s’éjecte hors de ce trône improvisé. Il redescend vers, je le suppose, sa tanière… qui est, je le gagerais, chez ma voisine Blondinette à la santé de fer et qui est une voisine quasi invisible car elle tient un boulot de nuit.
Mon tour. J’ai avalé mes céréales et café à la main, je sors. Humer avril ? Toute la fin de mars, tout le « tout début » d’avril le fond de l’air fut frais, très frais même certains jours. Enfin ce jour-là une certaine douceur dans l’atmosphère. Ça fait du bien. Bruit de planches remuées sous l,Escalier ! Je me penche, je finis par apercevoir le fessier de Donalda, ma chère marmotte. Ah, ah, aménagement, rénovation, déplacement saisonnier…quoi, ce bruit ? Elle disparaît. Bon. Elle est toujours vivante. Vit-elle toujours seule ? Y a-t-il un coloc ? Un Alexis ? Ou un méchant Séraphin ? A-t-elle eu un ou deux rejetons. Me voilà de bonne humeur, je verrai sans doute mes rats musqués quand le lac va caller, très bientôt, et qui encore ? La famille-canard ? Des mouettes vont tacheter le ciel de lignages blancs,
Un bébé castor égaré va passer en nageant férocement, peureux ? Des poissons rouges réapparaître comme l’an dernier, reverrais-je bientôt mes deux tourterelles de chamois au chant si triste ? Vies-t-en donc au plus vite printemps, viens mieux. Gonflez-vous bourgeons des lilas, poussez petites fleurs sauvages précoces audacieuses.
On ne me trouve pas de place à Saint-Jérôme encore pour me remplacer la hanche, tous ces mois à attendre et cette douleur sans cesse …bof, j’attendrai bien plus patiemment si la nature se déploie, je geindrai bien moins, mon amour !
Les poissons rouges dans le réservoir de votre castor sont des Ombles Chevalier, Salvelinus, salvelinus, communément appelées « Truites rouges du
Québec ». Ce poisson peut atteindre 3 pieds de longueur. Lorsque captives
d’un barrage, elles ne peuvent plus accomplir leurs périples. Alors atteindre 3 pieds, dans nos eaux, tient du miracle avec la sur-pêche et le braconnage.
Et ce voisin qui a envoyé les policiers deux fois chez moi cet hiver, parce que mon défunt chien, mais à l’époque encore très là, jappait trop fort et trop souvent lorsque ses chats venaient renifler tout autour de mes belles poubelles vertes dans l’espoir de se trouver un petit quelque chose à se mettre sous la dent, un voisin flanqué de ses fils à gros bras, qui démonte son garage de contreplaqué en me faisant la gueulle, comme pour cacher son mal à l’aise d’avoir brisé une si bonne relation de voisin à voisin…
Et l’autre voisin d’en arrière dont le fils adolescent a trouvé ma fille de son goût, juste assez pour esseyer avec ses chums de la conduire de force dans leur garage, heureusement, elle a du nerf, de la gueulle et du caractère…
Et l’autre voisin de coté qui vient de vendre sa maison pour déménager en campagne pour receuillir sa fille de 26 ans, enceinte sans savoir de qui et déprimée de la chose…
Et l’autre de l’autre côté dont les fortes odeurs de potte glissent hors de sa remise depuis que la neige ne l’isole plus de tous ces voisins si dérangeant…
Et ma participation au Salon du livre de Québec ou je fais beaucoup plus figure d’être là que de vendre quoi que ce soit…
Et ce genoux qui m’agace à cause d’un bête accident de travail et qui me vaut douleurs et physio depuis des mois…
Et dans le chez nous que j’apprivoise depuis 6 ans bientôt, il n’y a pas de lac, pas de castor, pas de plage, il y a tout mais il n’y a rien, sauf peut-être, elle, car dans tout ce brouhaha, il y a une présence signifiante, rassurante, chaleureuse, réconfortante, il y a l’amour de ma femme, hummm…
Et vivement l’été, que ces relations gaspillées par ce long hiver se resoudent enfin…
Et puis il y a moi, plus j’écris plus je me connais et plus je comprends que la mémoire et le talent sont deux grandes qualités, elles permettent de lier ensemble des événements disparates et parfois d’en faire un chef d’oeuvre…
Après la pluie le beau temps, après l’hiver l’été, ajouterais-je…